Insolite : l’Algérie interpellée par 3 parlements et le Conseil de sécurité de l’ONU en une semaine
Insolite : l’Algérie interpellée par 3 parlements et le Conseil de sécurité de l’ONU en une semaine
Fait sans précédent dans l’histoire de l’Algérie depuis son indépendance, le régime militaire algérien fait l’objet de critiques simultanées de la part de trois organes parlementaires et du Conseil de sécurité des Nations unies en l’espace d’une semaine. Et ce fut au sujet de son bilan en matière de droits de l’homme et de sa régression vers une « voyoucratie », au sens propre du terme.
L’Algérie interpellée par les parlements européen, français et espagnol et par le Conseil de sécurité des Nations unies
Le Parlement européen a débattu aujourd’hui du cas de l’écrivain et penseur franco-algérien Boualem Sansal à son arrivée à Alger. Son enlèvement par la police secrète intérieure algérienne et sa disparition ont été largement condamnés comme une atteinte à la liberté d’expression. Parallèlement, le parlement espagnol exige des réponses de son gouvernement concernant la tentative d’enlèvement du journaliste algérien Hichem Aboud à Barcelone, un incident que les autorités espagnoles ont lié à une organisation narco-criminelle opérant en Espagne, qui avait conclu un contrat d’enlèvement et d’exfiltration de plusieurs millions d’euros avec les services de renseignement algériens. Le député français Guillaume Bigot (Rassemblement national) a dénoncé l’arrestation de Sansal et critiqué les responsables algériens pour avoir condamné la France alors qu’ils envoient leurs enfants dans des établissements d’enseignement français. Au Conseil de sécurité des Nations unies, l’ambassadeur israélien Danny Danon a condamné le bilan de l’Algérie en matière de droits de l’homme, citant les mauvais classements en matière de liberté économique et d’égalité des sexes, et a qualifié les actions du régime, en particulier à l’égard d’Israël, de « menaces vides de sens ».
Ce que la communauté internationale ne réalise peut-être pas pleinement, c’est qu’elle n’a fait qu’effleurer la surface des actions graves et clandestines que le régime militaire d’Alger a menées tout au long de son existence, et en particulier au cours des cinq dernières années. Entre 1990 et 1999, le régime se serait engagé dans des opérations sous fausse bannière, dissimulant ses actions sous le couvert de l’islamisme radical et d’actes terroristes. Aujourd’hui, de telles justifications sont plus difficiles à soutenir et les actions du régime sont de plus en plus révélées au monde. Au moins 26 officiers supérieurs de l’armée et des services de renseignement ont été emprisonnés pour trahison et corruption. Bien que ces accusations puissent être fondées, les observateurs conviennent sans équivoque qu’elles sont fondamentalement motivées par des vendettas personnelles orchestrées par Mohamed Mediene, le général Said Chengriha, Abdelkader Haddad, Djebbar Mehenna et Hamid Oubelaïd. En outre, de nombreux militaires et hauts fonctionnaires sont morts dans des circonstances apparemment suspectes. Pendant la pandémie de COVID-19, des rapports ont fait état d’individus qui auraient été assassinés sous le couvert de la crise sanitaire. Au cours de l’été 2022, des incidents impliquant les fils d’anciens responsables, comme feu le général Ahmed Gaid Salah, et des membres entiers de familles comme la famille Bennacer, entre autres, ont suscité de nouvelles inquiétudes quant aux luttes de pouvoir et aux méthodes internes du régime.
Les contradictions du régime militaire algérien sous les feux des projecteurs
Alors que les projecteurs se braquent sur le régime militaire algérien, une série de contradictions flagrantes sont apparues, révélant un double discours entre posture à l’international et posture intérieure. Ces contradictions soulignent la propension du régime à projeter une façade de pureté idéologique et de ferveur nationaliste, tout en s’engageant simultanément dans des actions qui sapent directement ses principes déclarés publiquement. Les points suivants mettent en lumière la duplicité du régime :
Rhétorique anti-française contre utilisation des institutions françaises : Le ministre algérien de la communication, Mohamed Meziane, a été un critique virulent de la France et s’est livré à un monologue sur les médias algériens, lynchant Boualem Sansal en l’accusant d’être une marionnette du lobby français, bien qu’il ait des enfants inscrits dans des universités françaises. Cette duplicité a été mise en lumière par Guillaume Bigot au Parlement français.
Critique de l’OTAN et recherche de son parapluie de sécurité : Malgré un positionnement anti-occidental historique et des liens étroits avec la Russie et la Chine, le régime militaire d’Alger a signé un accord de sécurité avec l’OTAN pour protéger ses infrastructures pétrolières et gazières. Cette décision reflète l’approche pragmatique du régime pour garantir ses intérêts économiques, même si cela implique de collaborer avec des organisations qu’il a publiquement critiquées.
Les revendications de souveraineté contre les dépenses militaires et la surveillance de l’OTAN : Le régime algérien se vante depuis longtemps de son autonomie et de sa souveraineté. Cependant, l’augmentation de son budget militaire a suscité des demandes de la part des parlementaires de l’OTAN qui se sont rendus à Alger et ont rencontré Abdelmadjid Tebboune et Saïd Chengriha pour obtenir des justifications et des explications supplémentaires, comme cela a été explicitement indiqué dans le tweet du parlement de l’OTAN.
Dénonciation d’Israël et engagement avec des lobbyistes pro-israéliens : Bien que dénonçant publiquement Israël et s’alignant sur la cause palestinienne, l’Algérie a engagé les services du cabinet de lobbying américain BGR Group, qui a des liens directs avec Israël et qui a joué un rôle capital dans les Accords d’Abraham. Cet engagement, qui coûte à l’Algérie une redevance annuelle de 720 000 dollars, souligne les manœuvres discrètes du régime pour s’attirer les faveurs et renforcer son influence dans les cercles politiques américains. Cette dualité est également illustrée par l’interdiction par l’Algérie des manifestations pro-palestiniennes soutenant Gaza. La seule exception à cette interdiction a été une manifestation qui aurait été orchestrée par les forces de sécurité elles-mêmes, ce qui suggère que même les expressions de solidarité avec la Palestine sont soumises au contrôle de l’État et à la manipulation à des fins politiques.
Ces actions indiquent une stratégie calculée du régime algérien pour maintenir une ligne extérieure dure en accord avec la population algérienne, tout en poursuivant en parallèle des efforts diplomatiques et de lobbying destinés à protéger et à assurer sa survie. La révélation de ces divergences suscite des critiques, car elle met en évidence la volonté du régime de sacrifier des positions de principe pour parvenir à ses fins, ce qui le fait correspondre à la définition d’une voyoucratie.
La convergence des regards internationaux sur le régime militaire algérien marque un tournant. Les contradictions du régime, sa rhétorique anti-occidentale associée à sa dépendance envers les institutions occidentales, ses revendications de souveraineté minées par sa dépendance envers les accords de sécurité étrangers, et son antisionisme juxtaposé à son engagement envers les lobbyistes pro-israéliens, révèlent un calcul cynique axé uniquement sur la préservation du régime.
Cette duplicité, associée à des allégations crédibles d’exécutions extrajudiciaires, de morts suspectes et d’emprisonnements pour motifs politiques ciblant Saïd Chengriha, Abdelkader Haddad, Hamid Oubelaïd, Mohamed Mediene, Djebar Mehenna, dresse le sombre tableau d’une voyoucratie qui consolide son pouvoir aux dépens de ses citoyens et de la stabilité régionale. La communauté internationale ne peut plus se permettre d’ignorer l’escalade de la crise en Algérie. Ne pas demander des comptes au régime militaire d’alger, c’est non seulement renforcer ses tactiques répressives, mais c’est aussi risquer de déstabiliser davantage une région instable. Il est temps de prendre des mesures décisives, notamment des poursuites ciblées contre les responsables des crimes de guerre, de violations des droits de l’homme et de la corruption.
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