La semaine dernière, plus précisément le mardi 12 novembre, deux lettres envoyées par des experts onusiens aux gouvernements algérien et français le 13 septembre dernier ont été rendues publiques. Ces lettres, émises dans le cadre des mandats confiés à ces experts par le Conseil des droits de l’homme, abordent les essais nucléaires français effectués dans le Sahara algérien entre 1960 et 1966, ainsi que leurs impacts sur les droits de l’homme et l’environnement. À ce jour, les experts n’ont reçu aucune réponse des deux parties.
Les lettres en question ont été rédigées par le Rapporteur spécial sur les droits de l’homme et les substances toxiques, le Dr Marcos Orellana, le Rapporteur spécial sur la promotion de la vérité, de la justice, de la réparation et des garanties de non-répétition, le Professeur Fabian Salvioli, et l’Experte indépendante sur les droits des personnes âgées, Mme Claudia Mahler.
Les experts onusiens ont exprimé à la France leur vive inquiétude concernant les graves conséquences sanitaires des essais nucléaires pour les populations locales, impacts qui s’étendent sur plusieurs générations. Ils ont également déploré l’absence d’accès des victimes à des informations complètes sur ces essais, notamment sur la localisation exacte des sites d’expérimentation et des zones contaminées où des déchets radioactifs ont été retrouvés. Les experts ont demandé au gouvernement français de fournir toutes les informations relatives à ses essais nucléaires en Algérie, y compris les emplacements des déchets radioactifs, et de clarifier si ces informations ont été pleinement et de manière transparente communiquées à l’Algérie, aux parties concernées, et aux parties prenantes. Ils ont également demandé des précisions sur les démarches entreprises pour informer les victimes de leurs droits et des mécanismes de demande d’indemnisation. Les experts se sont interrogés sur la volonté de la France de présenter des excuses officielles à l’Algérie ainsi qu’aux communautés affectées par ces essais.
Les experts ont également exprimé leur préoccupation face au manque d’initiatives de la part du gouvernement algérien pour surveiller les mesures sanitaires et réhabiliter les zones touchées. Ils ont souligné l’insuffisance d’informations fournies par les autorités aux populations concernées sur les risques et les conséquences persistantes des essais nucléaires. Le manque d’organisations indépendantes de défense des victimes en Algérie a également été pointé comme une source d’inquiétude. Les experts ont demandé au gouvernement algérien de clarifier les actions entreprises pour informer correctement les populations sur les risques en cours et les mesures prises pour éviter de nouveaux dommages. Ils ont également interrogé le rôle de la société civile dans les efforts pour remédier aux conséquences de cette catastrophe.
Conformément à ses principes, l’Organisation Choua a déployé des efforts considérables pour défendre et mettre en lumière le dossier des essais nucléaires français en Algérie. À travers des échanges avec des rapporteurs et des experts onusiens, l’affaire a été remise sur la table des instances internationales afin de déterminer les responsabilités liées aux conséquences persistantes des essais nucléaires dans le Sahara algérien. Cependant, le silence des deux gouvernements face à la lettre des experts reflète un manque de coopération flagrant.
L’Organisation Choua espérait que le gouvernement algérien, principal concerné par ces essais, réponde rapidement à la lettre, notamment dans la première semaine suivant sa réception. En effet, le président Abdelmadjid Tebboune s’est souvent exprimé sur le sujet de la mémoire, y compris sur les essais nucléaires, critiquant le refus de la France d’assumer pleinement sa responsabilité. Dans une déclaration du 5 octobre 2024, il a affirmé : *« Si la France veut être sérieuse dans ses relations avec nous, qu’elle descende et qu’elle nettoie les lieux où elle a mené ses essais nucléaires. »* Pourtant, l’absence de réponse des autorités algériennes à cette lettre soulève des interrogations sur l’écart entre les déclarations publiques et les actions concrètes nécessaires pour traiter ce dossier. Par ailleurs, les restrictions imposées aux populations affectées et aux militants écologistes qui s’intéressent à cette question illustrent une contradiction dans la position officielle algérienne.
Face à cette situation, l’Organisation Choua exprime son profond mécontentement face au silence des deux gouvernements. Elle considère que ce mutisme constitue un manquement explicite à leur obligation de coopérer avec les instances onusiennes, malgré l’importance et la sensibilité du sujet.
Choua appelle le gouvernement français à collaborer avec les instances onusiennes sur le dossier des essais nucléaires dans le Sahara algérien, à assumer la responsabilité de cette « catastrophe persistante », y compris en déclassifiant les documents secrets et en indemnisant les victimes. Elle exhorte également la France à signer et à ratifier le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires pour démontrer sa bonne foi dans le traitement des conséquences de ces essais.
De même, Choua appelle le gouvernement algérien à coopérer avec les instances onusiennes, à fournir des informations complètes aux populations affectées sur les risques persistants, et à faciliter le travail des associations écologiques et sanitaires. Elle insiste sur le droit de la société civile d’accéder à l’information pour renforcer les efforts nationaux et internationaux dans la gestion de cette catastrophe. Enfin, l’Organisation Choua invite l’Algérie à ratifier le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires.